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«C’est le peuple qui m’a faite…je suis la candidate des gens, la candidate de l’insoumission» déclarait Ségolène Royal après la primaire interne organisée par le parti socialiste, le 16 novembre dernier.   
 
Mais le résultat du deuxième tour de l’élection présidentielle avec 46,94% des voix, comme celui du premier tour avec seulement 25,83% des voix, malgré le ralliement des Radicaux de gauche et des Chevènementistes, confirme que le PS peine toujours à reconquérir l'électorat populaire. Le basculement à droite dans 16 régions sur 22, du département du Nord ou de localités comme Martigues ou Istres dans les BdR, traditionnellement à gauche, est à cet égard significatif.
 
Après avoir puisé dans les sondages des propositions à même de plaire au peuple, Ségolène a séduit surtout une France paisible, semi-rurale et n’a finalement pas réussi à prouver que sa crédibilité n’était pas seulement celle de son image…
 
 
 
 Bertrand Delanoë l’a énoncé comme une lapalissade au soir du deuxième tour mais c’est profondément vrai : “Quand la gauche n’est pas assez claire, on ne la comprend pas”.

Il est en effet étonnant que la candidate du PS n’est pas su exploiter le bilan d’une droite jugée en fâcheuse posture voici seulement un an, au moment des manifestations anti CPE ! Une droite dont les représentants, peu scrupuleux, ont présenté le contenu de leur programme comme si le président de la République n’était pas de droite depuis 12 ans ou comme si l’UMP avec ses 359 députés n’était pas majoritaire à l’assemblée nationale depuis 5 ans !
Mais si la candidate socialiste est largement responsable du score le plus bas fait par la gauche depuis 1965, lors d’un second tour d'une élection présidentielle, le PS n’est pas exempt de critiques.
Et d’abord, l’organisation de la primaire en vue de la désignation du candidat. Etait-il bien judicieux que les candidats à la candidature débattent et exposent leurs divergences devant les caméras, laissant ainsi des plaies plus ou moins ouvertes pendant la campagne.

Etait-il sain que le PS, en voulant faire du neuf, laisse les seuls adhérents socialistes maîtres du jeu. Quand on connaît la composition socio-économique des adhérents, la prépondérance des fonctionnaires, l’importance des adhérents de fraîche date, à 20 euros, ne connaissant souvent que le contenu des sondages du moment, le choix était pour le moins risqué…
Les commentateurs politiques en ont parlé comme s’il s’agissait d’un scrutin au suffrage universel. Or il n'y a pas de rapport mécanique entre les deux. Le Parti socialiste est une organisation à l'intérieur de laquelle, jusqu'à l'arrivée des nouveaux adhérents par Internet, 40 % des adhérents étaient des élus, et une proportion considérable des employés municipaux, intercommunaux, départementaux ou régionaux.
En fait, pour la majorité des 180 558 adhérents qui ont voté, la première préoccupation n'était pas de refléter les tendances profondes de la société, mais d'assurer la victoire électorale de leur camp en fonction des instituts de sondage qui avaient pronostiqué une victoire inéluctable de Ségolène Royal. Parmi les nouveaux adhérents se trouvaient aussi des classes supérieures, ­ tendance bobo, reflétant faiblement la réalité sociologique du pays.
Après le vote pour le Oui au TCE en 2005 alors que le Non était majoritaire à gauche, les adhérents socialistes se sont une nouvelle fois trompés en désignant sans doute le candidat le moins compétent des trois prétendants. Les partis de gauche italiens ont été plus prudents en la matière, organisant une consultation beaucoup plus large entre électeurs, qui a débouché sur le choix de Romano Prodi. Et dans la plupart des pays démocratiques, c’est le président ou le 1er secrétaire du parti qui se présente aux plus hautes fonctions, après une désignation en congrès extraordinaire.

La suite, on la connaît, la candidate désignée par le PS s’est cantonnée à ressasser des généralités, mettant à toutes les sauces le mot «ordre juste» tout en invitant les Français à déployer le drapeau tricolore dans leur appartement...
N'oublions pas que Ségolène Royal est, comme Jean-Pierre Raffarin, l'élue de la région Poitou-Charentes, qui n'est certainement pas la région où les problèmes de la société française se posent avec le plus d'acuité.

Les erreurs, les revirements inexpliqués ou la méconnaissance des dossiers n’ont pas manqué :

Les éléphants
Les éléphants sont chassés dans un premier temps par Ségolène puis reviennent par enchantement dans un comité comprenant treize d’entre eux, dont est absent Michel Rocard, puis sont à nouveau critiqués…

Eric Besson
Au-delà de la traîtrise d’Eric Besson qui n’est d’ailleurs pas le seul (Claude Allegre, Roger Hanin et autre Michel Charasse, etc.) , l’ancien secrétaire à l’économie du PS voulait néanmoins chiffrer le programme du PS à la différence de Ségolène Royal qui a donné trop souvent l’impression de ne pas vouloir rentrer dans le contenu des dossiers et l’aspect budgétaire…

François Bayrou
François Bayrou est qualifié d'homme de droite avant le premier tour puis comme un Premier ministre possible, en concurrence avec Dominique Strauss-Kahn, après le deuxième tour !

La proportionnelle
Le pouvoir doit être partagé et non dans les mains d’un seul parti, a-t-elle répété. Laissons de côté le fait que le PS promet depuis longtemps la proportionnelle sans la faire... Ségolène n’a jamais précisé la part exacte de proportionnelle contrairement à François Bayrou qui a opté pour 50% de sièges de députés élus au scrutin majoritaire et 50% élus à la proportionnelle dans le cadre de circonscriptions régionales.

La décentralisation
Je préciserai les responsabilités de chaque structure administrative» a-t-elle encore dit et notamment celles des communes, départements et régions alors que la véritable modernité consiste à faire disparaître purement et simplement au moins un échelon administratif, en l’occurrence le département. Sur ce point également, François Bayrou a été beaucoup plus clair : «Départements et régions doivent être administrés par les mêmes élus, qui délibèreront tantôt dans le cadre départemental, tantôt dans le cadre régional. Dans le cadre départemental, ils décideront, par exemple de solidarité ; dans le cadre régional, de stratégie économique. Mais ce seront les mêmes hommes, la même administration, le même budget, et tous les doublons seront évités».

Le Smic à 1500 €
Dans le programme du PS, on peut noter que «le SMIC sera porté à 1 500 euros, le plus tôt possible dans la législature». Mais Ségolène précise début mars à la télévision que ce montant ne sera atteint qu’au bout de cinq ans, le SMIC passant ainsi de 1 254 € au 01/07/06 à 1 500 € à la fin de la législature. Or, grâce à l’indexation automatique du SMIC au 1er juillet de chaque année, le SMIC atteindra de toute façon 1500 € en 2012 et ce quel que soit le candidat élu…

Les allocations familiales

En parlant uniquement de mise sous tutelle des allocations familiales pour les familles qui ne “tiendraient pas correctement leurs enfants”, Ségolène Royal a esquivé de fait le vrai débat concernant les modalités d’attribution de ces allocations. Car, aujourd’hui, un jeune couple venant de débuter dans la vie, ayant un enfant à charge, voire un couple en difficulté financière (chômage, temps partiel subi, etc.), ne touche pas d’allocations familiales puisque celles-ci ne sont versées qu’à compter du deuxième enfant. Ségolène Royal qui parle volontiers du droit des femmes en citant souvent le modèle social des pays scandinaves devrait savoir qu’en Norvège notamment, elles sont versées dès le 1er enfant… Situation renversante à plus d’un titre car c’est justement Nicolas Sarkozy qui a proposé d’attribuer les allocations familiales dès le premier enfant ! Et les injustices ne s’arrêtent pas là. Pendant que ces familles, souvent modestes, ne touchent pas d’allocations familiales, celles ayant au moins deux enfants ou plus et vivant confortablement (cadres supérieurs, professions libérales, PDG, etc.) les perçoivent alors qu’elles n’en ont pas un besoin vital pour vivre !


La régularisation des sans-papiers
La proposition de régularisation des sans-papiers a été perçue, à tort ou à raison, comme une régularisation systématique dont ne veulent pas les Français. Ce sentiment s’est même renforcé après la régularisation massive des sans-papiers en Espagne par José Luis Zapatero, venu soutenir Ségolène lors d’un meeting commun. La Droite n’a jamais autant cité dans cette campagne la phrase de Michel Rocard : «On ne peut pas accueillir toute la misère du monde»…

Les droits de succession et la baisse d’impôts
Lors du débat télévisé avec Nicolas Sarkozy qui s’est prononcé pour une exonération totale des droits de succession et une nouvelle baisse d’impôts sur le revenu, Ségolène n’a pas vraiment répondu à son interlocuteur et a omis de préciser que la conséquence de ces mesures sera d’augmenter les impôts indirects, par définition injustes, car touchant les riches et les pauvres de la même façon. Supprimer toute imposition du patrimoine et réduire encore le volume de l’impôt sur le revenu sera un véritable bond en arrière dans un pays où 10% des ménages détiennent 46% du patrimoine et où 3% des ménages les plus riches détiennent 36% du patrimoine financier.

La réforme des retraites
Au sujet des retraites, Ségolène a renvoyé, sur ce sujet également, à la discussion avec les partenaires sociaux. Pas un mot sur une éventuelle abrogation de la réforme Fillon 2003, voire celle de Balladur en 1993 qui a changé le mode de calcul des retraites (prise en compte des 25 meilleures années au lieu des dix meilleures avant 1993, provoquant ainsi une baisse importante du montant des pensions). Seule précision : si la croissance ne suffit pas à résorber le déficit du régime des retraites, une taxe sur les plus-values boursières sera envisagée…

Les handicapés
En ce qui concerne l’accueil des handicapés à l’école et au-delà de ses propos en partie contestables, elle a préféré surtout se lancer dans une dispute surfaite, destinée avant tout à donner l’image d’une femme montrant du caractère et attentive aux problèmes des handicapés. Mais parfois, trop, c’est trop…

et beaucoup d'autres sujets à caratère politique...
Après Le non à la Constitution européenne le 29 mai 2005, les émeutes ou les manifestations contre le CPE, un projet économique mettant clairement en cause le libre-échange, les délocalisations, le niveau trop faible des salaires, les mesures fiscales en faveur des plus riches aurait pu permettre à la gauche d'aller vers l’électorat populaire et de remporter cette élection.

Mais rien de tel dans le discours de Ségolène. Son féminisme a satisfait d’abord les classes supérieures, qui conçoivent le couple comme l'union de deux individus libres sans enjeu économique réel.

En réalité, qui veut fuir la réalité économique en activant les valeurs sociétales, la sécurité et les questions d'identité, finit toujours par faire le jeu de la droite… 
Tag(s) : #Institutions - Politique
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